Ce que tu vis seulement te trace


Dans les prés sauvages s'est ouvert le bal, avec le geste du naturel et le silence en résonance. Une scène vivante, loin du monde, près de soi, où les injonctions et les codes se dissipent.

Improvisant une poignée de minutes, à l'écoute des mouvements impulsés par le milieu ambiant, ses formes, son foisonnement, une liberté, une femme se réapproprie l'espace.

Un espace farouche, propice et hostile, parfois mutilé, la nature, puis le sien, son corps, sur un terrain où manque en général le féminin. Qui dessine l'espace ?

Personne derrière l'appareil, il se déclenche seul, à intervalles réguliers, une part de hasard est invitée. Valse avec l'instant et sa vivacité. Le naturel se dévoile, l'accessoire se retranche, une histoire instinctive s'écrit.

Ce que l'on vit nous révèle, signe une silhouette. Entrer dans le champ pour déposer des gestes insolites, réenvisager l'espace et sa trajectoire de façon inédite en lien avec le vivant.

Tu ne traces rien. Ce que tu vis seulement te trace dans la mesure où ce que tu vis est inconnu de tous, même de toi  -  Francis Palanc, artiste brut  (1928-2015)


What you experience only shapes you


The wild meadows set the ball rolling, with the gesture of nature and the silence resonating. A natural stage, far removed from the world, close to oneself, there injunctions and codes dissipate.

Improvising for a handful of minutes, listening to the movements driven bu the environment, its shapes, its abundance, a freedom, a woman reclaims space.

A fierce, favourable and hostile space, sometimes mutilated, the nature, and her space, her body, on a field where the feminine is generally missing. Who designs space ?

No one behind the camera, it triggers itself, at regular intervals, a kind of chance is invited. Waltz with the moment and its liveliness. The natural is revealed, the accessory gets withdrawn, an instinctive story is writing.

What we experience reveals to us, signs our silhouette. Include within the scope to draw unusual gestures, reconsidering space and one's own trajectory as a new way in connection with the living.

You don't shape anything. What you experience only shapes you to the extent that what you experience is unknown to everyone, even to you  -  Francis Palanc, outsider artist (1928-2015)


Les étendues intermédiaires


Au creux de l’espace qui se cache entre deux images gît une substance discrète, invisible à l’œil nu, imaginaire, que la photographie argentique divulgue. L’inconscient optique de Walter Benjamin, ce qui est révélé par l’appareil mais que l’œil ne perçoit pas ?

Avec un appareil brut, un jouet, sans aucun réglage, c’est le corps qui prend naturellement les commandes. Un geste, et tout le spectre visible se concentre dans la brume d’une spontanéité. La part visuelle et intentionnelle se détachent. On rejoint les plages du ressenti.

Ces images réalisées à la prise de vue, sur le négatif, en deux, trois ou quatre déclics, se fient aux éléments, à la matière, au hasard d’une déambulation. Elles superposent les expériences, les couches de mémoire et glissent grâce aux ressorts de l’émulsion de l’autre côté du monde.

C’est l’intervalle entre les images qui dessine de nouveaux territoires, ces étendues inédites qui interpellent l’imagination, où finalement il y a plus à projeter qu’à voir.

D’abord sur le terrain des mes origines en Normandie, et maintenant en tous lieux, je cherche au-delà du visible les traces d’un paysage plus intérieur, peut-être même antérieur.

The middle expanses


Within the hollow space hidden between two pictures there lies a discreet substance,  not visible to the naked eye, an imaginary field, that analogue photography discloses. Maybe The optical unconscious of Walter Benjamin, what is revealed by the camera but that the eye does not detect?

With a raw device, a toy, without any adjustment, the body naturally becomes captain. A gesture and the whole visible spectrum gets concentrated into the mist of spontaneity. The visual and intentional parts move away. We reach the beaches of feeling.

These photos find their shape during the shooting time, on the negative, after two, three or four clicks. They rely on the elements, on the material perception, on the chance of a wandering. They superimpose experiences, layers of memory and slide thanks to the emulsion quality into the other side of the world.

It is the interval between images that draws new territories,these original expanses which challenge the imagination, where ultimately there is more to project than to see.

First on the land of my origins in Normandy, and now among any other places, I search beyond the visible for traces of a more interior landscape, perhaps even an anterior one.


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